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La transplantation pulmonaire

La transplantation pulmonaire

La transplantation pulmonaire

Communication du Dr Daniel Dilling, professeur à l’université de Loyola (université catholique de Chicago). Cincinnati, 6-9 septembre 2018

Indications pour une transplantation

  • Limitations sévères de la qualité de vie.
  • Insuffisance respiratoire.
  • Multiples pneumothorax.
  • Besoin d’oxygène au repos.
  • VEMS 30 % prédits.

Complications spécifiquement liées à la LAM

  • Problèmes pleuraux.
  • Saignements d’angiomyolipomes.
  • Récurrence de la LAM dans les poumons transplantés.

Comment gérer la médication sirolimus et everolimus ?

Sirolimus a fait ses preuves dans la stabilisation de la maladie, ce qui signifie qu’il y a moins de patientes LAM qui nécessitent une transplantation[1]. Mais la rapamycine (sirolimus) n’est pas sans danger en cas de transplantation, car cet immunodépresseur peut créer des problèmes de cicatrisation des points de suture au niveau de l’organe transplanté (déhiscence anastomotique). Il n’est donc pas indiqué de prendre ce médicament lors d’une transplantation.[2]

Toutefois, on sait que si l’on cesse le traitement au sirolimus, la fonction pulmonaire décline à nouveau, ce qui est bien entendu à éviter dans la mesure du possible.

Que fait-on aujourd’hui ? État de la situation.

Une enquête internationale s’est intéressée à la politique des divers centres de référence relativement aux inhibiteurs mTOR pour les patients sur liste d’attente de transplantation. Le taux de réponse a été de 41%, dont 43% hors d’Amérique du nord. 62% ont été confrontés à la question et ont eu à décider si les patientes LAM pouvaient continuer à prendre un inhibiteur mTOR.

De nombreux centres ont demandé à la patiente d’arrêter le sirolimus. Une fraction a fait passer la patiente sur everolimus, tandis qu’une égale proportion a malgré tout laissé la malade sur sirolimus pour éviter une dégradation de la fonction pulmonaire.

Le Dr Dilling et son équipe proposent la solution suivante : poursuivre le sirolimus jusqu’au placement de la patiente sur la liste d’attente ; passer à everolimus lors de l’inscription sur la liste d’attente, en visant des dosages minimaux (3-5 ng/ml) ; conserver ce dosage jusqu’au moment de l’opération[3].

Caractéristiques des patientes LAM candidates à la transplantation pulmonaire

  • VEMS obstructif 26%.
  • VEMS obstructif et restrictif 20%.
  • DLCO 27% préd.
  • Pression partielle de l’oxygène (PA02) 53 mmHg.
  • Pression partielle de dioxyde de carbone (PACO2) 43 mmHG.
  • Echelle de dyspnée MRC :4-5[4].
  • Besoin d’oxygène au repos 93% des patientes.

Echelle de dyspnée MRC (Medical Research Council)

Degré Description
1 Absence de gêne liée au souffle, sauf pour les exercices physiques intenses
2 Gêné par l’essoufflement à la marche rapide ou en gravissant une légère colline
3 Sur terrain plat, marche plus lentement que les personnes du même âge en raison de l’essoufflement, ou doit s’arrêter pour respirer en marchant à son propre rythme
4 S’arrête pour respirer après 100 mètres ou quelques minutes de marche sur terrain plat.
5 Trop essoufflé pour quitter la maison ou essoufflement en s’habillant et se déshabillant

Règles directrices pour la sélection des patientes susceptibles de transplantation

  • Atteinte grave, cliniquement et physiologiquement.
  • Pas de thérapie médicale effective.
  • Espérance de vie restreinte (2-3 ans).
  • Ambulatoire, avec potentiel de réhabilitation.
  • Etat nutritionnel acceptable.
  • Profil psychosocial satisfaisant et environnement de soutien.
  • Couverture financière suffisante.

Critères d’orientation vers la transplantation

  • Maladie progressive, en dépit de soins médicaux maximum, de réhabilitation pulmonaire et d’oxygénothérapie.
  • Développement d’hypertension pulmonaire ou de retenue de dioxyde de carbone.
  • VEMS < 30% prédit.
  • Pneumothorax multiples ou récurrents.

Critères de placement sur la liste d’attente

  • VEMS < 25% prédit.
  • Dyspnée dangereuse après réhabilitation pulmonaire et oxygénothérapie.
  • Besoin constant d’oxygène, même au repos.
  • Multiples exacerbations de la maladie ou hospitalisations respiratoires.
  • Pneumothorax incontrôlables.
  • Crise sévère avec grave problème respiratoire.
  • Hypertension modérée à sévère.

Transplantation pulmonaire. Questions à se poser (à soi-même et à son médecin)

  • Toutes les autres thérapies ont-elles été tentées ou exclues ?
  • Vous a-t-on dit que vous alliez sans doute mourir, sans une transplantation pulmonaire ?
  • Votre espérance de vie sans transplantation est-elle d’une ou deux années ?
  • Votre qualité de vie et état physique sont-ils actuellement médiocres et/ou déclinant rapidement ?
  • Êtes-vous par ailleurs en bonne santé ?
  • Êtes-vous prête à assumer les changements que va entraîner la transplantation dans votre style de vie ?
    • Prise à vie d’une médication complexe.
    • Fréquents examens médicaux.
    • Fréquentes bronchoscopies.

Que faut-il encore considérer ?

  • Couverture d’assurance. L’opération est extrêmement coûteuse (aux USA, env. 1’000’000 $).
  • Géographie (vous aurez-besoin d’aide et de soutien).
  • Réputation de l’hôpital.
  • Nombre de transplantations effectuées par cette institution.
  • Taux de survie après transplantation pulmonaire. Par exemple, en 2017, Strasbourg pouvait se vanter d’un taux de survie, à trois ans après la greffe, supérieur de 10% à celui de la moyenne nationale[5].
  • Expertise LAM.
  • Votre propre médecin est-il affilié à un Centre de référence LAM ?

Avant une transplantation, l’hôpital veut savoir :

  • Êtes-vous assez malade pour en avoir impérativement besoin ? Y a-t-il d’autres options ?
  • Êtes-vous motivée, et vous rendez-vous compte au-devant de quoi vous allez ?
  • Avez-vous des problèmes médicaux annexes qui augmentent les risques ?
  • Vos tests donnent-ils aux médecins des indications sur la meilleure manière de procéder dans votre cas particulier ?
  • Avez-vous un entourage susceptible de vous aider et soutenir ?
  • Risquez-vous d’interrompre votre médication, ou de ne pas vous rendre aux examens de contrôle ?

Il faut un village pour assurer le succès d’une transplantation :

  • Votre équipe de soutien à la maison.
  • Médecins et chirurgiens.
  • Infirmières.
  • Diététicienne.
  • Travailleurs sociaux.
  • Thérapie respiratoire.
  • Thérapie physique.
  • Groupe de soutien des transplantés.
  • Nombreux autres intervenants.

Opération et convalescence

  • Thoracotomie, souvent postérolatérale.
  • Le poumon malade est enlevé.
  • Le poumon du donneur est mis en place et cousu.
  • Les artères, veines et voies respiratoires sont connectées.
  • Les côtes sont ramenées en place.
  • Suture du sternum au moyen de fils métalliques en cas sternotomie transversale.
  • L’incision est fermée.

Complications à court terme

  • Hémorragie.
  • Problèmes de fluides.
  • Problèmes de rythme cardiaque.
  • Problèmes de rétablissement de la circulation sanguine («réperfusion»).
  • Complications sur les voies respiratoires.
  • Complications gastro-intestinales.
  • Infection pulmonaire.
  • Réjection aiguë.
  • Diabète (nécessitant souvent de l’insuline).
  • Problèmes rénaux.

Soins de suivi

  • Suivi une fois par semaine durant un mois, puis toutes les deux semaines durant deux mois, puis mensuel durant trois mois, enfin tous les trois mois.
  • Niveau de tacrolimus (antirejet), analyses de laboratoire, spirométrie à chaque visite.
  • A domicile, spirométrie quotidienne.
  • Bronchoscopie avec biopsie et culture (surveillance pour rejet aigu et infection).
  • Examens à 1, 3, 6, 9 et 12 mois après l’opération, ou plus souvent en cas de suspicion clinique.

Transplantation d’un seul, ou de deux poumons ?

Transplantation unique

  • Deux receveurs.
  • Moins de mortalité sur la liste d’attente.
  • Opération moins importante.
  • Meilleure survie à un an.
  • Moins de maladies à court terme
  • Mais :
  • Difficultés pulmonaires natives perdurent
  • Pneumothorax
  • Effusions chyleuses
  • Hyperinflation (augmentation de la capacité pulmonaire)

Double transplantation

  • Un seul receveur.
  • Liste d’attente plus longue.
  • Opération plus compliquée.
  • Meilleure survie à long terme.
  • Meilleure spirométrie après transplantation.

Quelques complications à long terme

  • Maladie rénale chronique.
  • Problèmes de rythme cardiaque.
  • Complications dans les voies respiratoires.
  • Complications gastrointestinales.
  • Réjection chronique.
  • Diabète.
  • Ostéoporose.
  • Cancers de la peau, cancers sur d’autres organes, lymphome.

Pleurodèse

Cette intervention consiste à irriter les tissus de la cavité pleurale afin de créer des adhérences de la plèvre viscérale à la plèvre pariétale. Cette irritation peut être provoquée par léger grattage ou par injection de talc stérile. Ceci a pour effet de supprimer la cavité pleurale.

Quelles sont les difficultés entraînées par la pleurodèse en cas de transplantation pulmonaire ?

  • Ceci augmente la difficulté d’ablation des poumons.
  • Chirurgie plus longue, nécessité éventuelle d’une machine de pontage.
  • Saignement accru durant et après l’opération. Éventuellement, retour en salle d’opération pour lavage de l’espace pleural.
  • Augmentation du risque de problème post-opératoire avec la fonction pulmonaire.
  • Plus de douleurs durant la convalescence.

Pleurodèse et transplantation pulmonaire

Dans une étude rétrospective de 14 patientes LAM ayant subi une pleurodèse[6], on a constaté :

  • Des adhésions extensives dans 71% des cas
  • Hémorragies significatives dans 50%
  • Malgré tout, les résultats à long terme et la fonction pulmonaire étaient au-dessus de la moyenne.

Dans une autre étude sur 80 patientes ayant subi une transplantation pulmonaire[7] :

  • 56% avaient précédemment subi une pleurodèse (bilatérale pour 75% d’entre elles).
  • 18% ont eu des complications hémorragiques durant l’opération (93% de celles ayant eu une pleurodèse) et la moitié d’entre elles ont eu besoin d’une seconde opération pour les complications de saignement.

Une autre étude encore sur 44 patientes avec transplantation pulmonaire[8] :

  • 50% avaient vécu une pleurodèse, et 41% d’entre elles en avaient eu une bilatérale
  • 46,6 % avaient des saignements augmentés durant la transplantation et 22% ont dû retourner en salle d’opération pour saignements.
  • Les résultats à long terme et les fonctions respiratoires étaient néanmoins au-dessus de la moyenne.

Recommandation

De précédentes interventions (pleurodèse ou pleurectomie) ne devraient PAS être considérées commes des contre-indications pour une transplantation pulmonaire pour les patientes atteintes de LAM.

Considérations additionnelles

Certains centres de compétence estiment qu’une histoire de pleurodèse empêche une transplantation. Le cas échéant, il faut donc se renseigner auprès d’un autre centre.

En cas de transplantation d’un seul poumon, on peut envisager une intervention sur le côté qui n’a pas subi de pleurodèse.

Le type de pleurodèse peut également influencer la décision de transplantation :

  • La pleurodèse mécanique devrait être la première option à considérer en cas de pneumothorax.
  • Il faudrait réserver la pleurodèse au talc aux cas de récidive.
  • Si possible, il vaudrait la peine de prendre un contact anticipé avec les chirurgiens du centre de transplantation lorsqu’il s’agit de décider d’une pleurodèse.

Une pensée émue pour les donneurs

La transplantation est un moment charnière dans une vie. Très souvent, et même encore des années plus tard, les patientes se souviennent précisément de la date de leur opération, cet événement étant vécu comme une seconde naissance. Nombreuses sont donc celles qui, ce jour-là, ont une pensée émue pour leur donneur, un anonyme qui, en perdant sa vie, a permis de sauver la leur. Certaines vont même jusqu’à faire une petite fête, ou une marche, ou même gravir une modeste montagne pour honorer leur bienfaiteur.

RÉFÉRENCES

[1] voir UNOS (United Network for Organ Sharing) https://unos.org/data/

[2] King-Biggs MB, Dunitz JM, Park SJ, Kay Savik S, Hertz MI., «Airway anastomotic dehiscence associated with use of sirolimus immediately after lung transplantation», Transplantation. 2003 May 15;75(9):1437-43. ‑ Jan Groetzner, Felix Kur, Fritz Spelsberg, Jurgen Behr, Lorenz Frey, Iris Bittmann, Michael Vogeser, Peter Ueberfuhr, Bruno Meiser, Rudolf Hatz, Bruno Reichart, the Munich Lung Transplant group, «Airway anastomosis complications in de novo lung transplantation with sirolimus-based immunosuppression», The Journal of Heart and Lung Transplantation, May 2004.

[3] D.F. Dilling, A. Nair, C.J. Gries, L.E. Leard, A.J. Fisher, S.R. Johnson, F.X. McCormack, «Use of Sirolimus in Patients with Lymphangioleiomyomatosis (LAM) on Waiting Lists for Lung Transplant (LTX)», The Journal of Heart and Lung Transplantation, April 2018.

[4] https://www.recherchecliniquepariscentre.fr/wp-content/uploads/2014/12/echelle_dyspnee_MRC.pdf

[5] http://www.chru-strasbourg.fr/sites/default/files/u105/Document1_Mode_de_compatibilite.pdf

[6] Pechet TT et al., JHLT 2004 ;33 :301.

[7] Almoosa KF et al., CHEST 2006 ;129 :1274.

[8] Reynaud Gaubert M. et al. Transplantation 2008 ; 86 :515.